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La violence au cœur des sociétés Vikings

La violence au cœur des sociétés Vikings
Dans les brumes mystérieuses de la Scandinavie de l’Âge Viking, toutes les terres nordiques ne vivaient pas la violence de la même manière. Une récente étude révèle que la Norvège, terre des fjords et des montagnes abruptes, baignait dans un bain de sang bien plus profond que son voisin danois.
Des chercheurs venus des quatre coins du monde, dont Jan Bill de l’Université d’Oslo et Lisa Mariann Strand de Trondheim, se sont lancés dans une quête : percer les mystères de la violence au sein de ces peuples farouches qui faisaient trembler l’Europe. Ils ont scruté les indices laissés dans les ossements, les tombes et les pierres gravées pour comprendre comment les Norvégiens et les Danois de l'époque viking vivaient avec la guerre, la mort, et l'honneur.
« Nous avons combiné l’archéologie et la sociologie pour comprendre comment la violence était ancrée dans ces sociétés. Contrairement à l'image courante des Vikings partant en raids, notre étude se concentre sur la violence interne à leurs propres terres, là où les épées étaient aussi souvent brandies entre voisins qu'entre ennemis étrangers »,
expliquent les chercheurs.

La mort comme compagne des Vikings

Quand on évoque les Vikings, l’imaginaire collectif se remplit immédiatement d’images de pillages, de bateaux drakkars sillonnant les mers, et de combats sanglants. Mais la violence ne se limitait pas aux rivages lointains qu’ils attaquaient. Non, elle imprégnait chaque facette de leur existence, bien au-delà des raids.
Leurs mythes eux-mêmes en sont témoins. La création du monde, selon la mythologie nordique, débuta dans un acte de violence sans nom : Odin, Vé et Vili, les premiers dieux, déchiquetèrent le géant Ymir pour façonner la terre à partir de son cadavre. Et à la fin des temps, le Ragnarök verrait les dieux et les hommes se déchirer dans une ultime bataille apocalyptique.
Le combat était plus qu'une nécessité, il était une voie d’honneur. Mourir l'épée à la main offrait la plus belle des récompenses : une place au Valhalla, où les guerriers défunts festoyaient en attendant le jour de la dernière bataille. C’est cette vision du monde qui forçait les Vikings à chercher la mort glorieuse plutôt que de fuir les dangers de la guerre.

Une Norvège plus sauvage et sanglante

L’équipe de chercheurs a mis au jour une découverte frappante : en Norvège, les chances de mourir violemment étaient bien plus élevées qu’au Danemark. En étudiant 30 squelettes vikings norvégiens, ils ont découvert que 37 % portaient des traces de blessures fatales infligées par des armes. En comparaison, seulement 7 % des squelettes danois révélaient de telles marques de violence.
Des femmes, aussi bien que des hommes, portaient les stigmates de ces affrontements. Un fait qui soulève des questions sur le rôle des femmes dans les conflits. Traitées avec la même brutalité que les hommes, elles devaient être des actrices politiques et sociales bien plus influentes qu’on ne l'imagine.
Mais ce qui est peut-être le plus révélateur, c'est l'importance des armes dans la culture funéraire norvégienne. Les tombes regorgent de lames, d'épées, et autres instruments de mort, bien plus qu’au Danemark. En Norvège, il était courant de reposer avec ses armes, comme si la guerre ne devait jamais vraiment s’arrêter, même dans la mort.

Des différences marquées entre la Norvège et le Danemark

Pourquoi une telle différence entre ces deux terres voisines ? Selon les chercheurs, la réponse réside dans les structures sociales. Le Danemark de l'époque viking avait déjà des institutions plus centralisées et une hiérarchie claire, où la violence était souvent encadrée par des lois et des règles. Des exécutions publiques, des punitions codifiées… Ici, la violence était organisée.
En Norvège, en revanche, la société était fragmentée en petites chefferies, et les conflits se réglaient souvent par la force brute. Chaque chef de clan devait constamment prouver sa valeur par l’épée. Et dans cette société où l’honneur et la vengeance étaient les piliers du pouvoir, le sang coulait fréquemment.
Les pierres runiques du Danemark reflètent cette organisation sociale plus stricte. Elles témoignent d’alliances complexes, d’autorités centralisées, là où les pierres norvégiennes ne parlent que de relations familiales et de clans, illustrant une société plus décentralisée et plus sauvage.

La christianisation et l’évolution des sociétés scandinaves

L’un des facteurs qui pourrait expliquer cette divergence est l'arrivée du christianisme. Le Danemark, avec ses liens plus proches avec l’Europe continentale, a adopté plus tôt la nouvelle foi. Avec elle, sont venus des changements dans les mœurs et la manière d'exercer la violence. La société danoise, plus ouverte à ces influences extérieures, a commencé à s’organiser autour de nouvelles valeurs, moins centrées sur la guerre et la vengeance.
En Norvège, les montagnes et les fjords ont maintenu une certaine isolation. La christianisation s'y est faite plus tardivement, et avec elle, le passage à des
formes de gouvernance plus pacifiées.

L’héritage des armes et du sang

En étudiant de près les sépultures et les squelettes, les chercheurs ont ouvert une nouvelle voie de compréhension sur la façon dont les Vikings vivaient la violence, non seulement sur les champs de bataille européens, mais aussi chez eux, entre eux. La Norvège, avec ses traditions enracinées dans la guerre et les armes, et le Danemark, plus discipliné dans sa gestion de la violence, illustrent deux faces d’un même monde viking.
Les chercheurs concluent que la véritable question historique à se poser n’est pas pourquoi ces sociétés étaient violentes, mais comment elles ont fini par dompter cette violence pour construire des civilisations où les liens sociaux pouvaient s’épanouir.
Un jour, la guerre s’est tue. Mais son écho, lui, résonne encore dans les pierres gravées et les épées retrouvées.

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